15 janvier 2008

Omar, un sans papiers à Paris



Omar a 36 ans. Il vient du Burkina Fasso et il est sans papiers. Il vit aujourd'hui à Paris. Avant qu'il ne débarque en France il y a quelques années, il a travaillé en Italie au noir comme mécanicien. Aujourd'hui, il passe ses journées à dealer et à dépenser l'argent qu'il se fait dans le lotto et autres jeux de hasard. Il cultive le rêve de ganger un jour le gros lot, pour accéder à une vie meilleure....
Il est sans abri. Il dort chaque nuit dans un foyer pour africains, où il dispose d'un matelat et de sanitaires. Il y va tard le soir, vers minuit quand tout le monde ou presque dort et repart au petit matin, vers 6 heures, avant que tout le monde ne se lève. Il n'aime pas ce foyer. Il n'aime pas être confronté à la misère des gens qui l'occupent, peut être parce que ca lui reflète sa propre misère...
Toute la journée, il ère. Il s'est fait quelques clients sûrs, à qui il revend du sheet ou de la beu. Il peut se faire par moment des marges confortables, plus de 1000 euros par mois, qu'il n'arrive pas à mettre de côté. Il investit tout dans les jeux de hasard. Mais il n'a jamais gagné le gros lot tant espéré...Pas encore du moins...
Omar a très peur de se faire attraper par la police dans la rue. Il en est devenu très angoissé, au point d'imaginer plusieurs stratèges afin de livrer ses clients dans le plus grand secret et en toute sécurité. Il s'est fait attrapé une fois par la police, il n'avait pas de papiers. Il a passé 48 heures au poste de police, qui n'arrivait pas à identifier son pays d'origine. Car Omar dit à tout le monde qu'il est ivoirien. Les policiers l'ont finalement relâché...
A son arrivée en France, il a fait une demande d'asile, en prétendant qu'il a fuit les conflits qui ravageaient la Côte d'Ivoir à l'époque de son arrivée. Il a essuyé un avis négatif. Les autorités lui ont demandé une preuve de sa nationalité. Il n'en disposait pas...
Omar a essayé de faire des économies, afin de corrompre un fonctionnaire ivoirien qui pouvait lui fournir une fiche d'état civil ivoirienne, moyennant 2000 euros. Mais à chaque fois qu'il a pu ramasser une petite somme, la tentation était trop forte, et il dépensait l'argent dans les jeux...
Omar est quelqu'un de bon et d'intelligent. Il refuse de vendre sa drogue aux lycéens et aux mineurs. Il est très poli, souvent souriant. Mais il est rongé par ses soucis. Il n'arrive pas à se défaire de son addiction aux jeux. Il n'arrive pas à trouver un autre boulot que dealer. Il a essayé de travailler au noir dans le bâtiment. Mais il a vite renoncé, car les conditions de travail étaient très dures. Il était payé une misère, et travaillait dans des conditions d'insécurité.
Ainsi va la vie d'Omar. Entre les jeux et le deal. Dans la rue, à érer, à attendre qu'un client ne l'appelle pour vendre un peu de sheet. Il ne peut pas retourner chez lui. Ses parents sont morts, et son frère ne l'appelle que pour lui demander de lui envoyer de l'argent. Il ne peux pas rentrer chez lui, car ca serait un aveu d'échec...
Aujourd'hui, Omar espère rassembler la somme d'argent nécessaire pour se procurer un papier d'identité ivoirien. Mais il sait que ses chances sont mineures. Les règles en matière d'immigration se sont beaucoup durcies en France, il a peur de faire partie l'année prochaine du groupe des 25 000 personnes que le gouvernement s'est promis de reconduire aux frontières.
Omar est souvent démoralisé ces derniers jours. Il constate qu'il a rien fait de sa vie, alors qu'il a 36 ans. Il est souvent triste. Mais il garde l'espoir. L'espoir de gagner le gros lot, un jour...



2 commentaires:

Amira Yaakoubi a dit…

C'est ça le profil de l'homme du "tier monde", c'est quelqu'un qui se bat pour subsister.
Le Sysiphe des temps modernes quelque peu pathétique, il porte le poids de l'histoire des autres...
Il est cette mouche; créature indésirable, qui se trouve emprisonnée dans une boite en verre qui se heurte à chaque fois à la vitre et recommence indéfiniment...

PS t'as une belle technique photo:)
j'ai vraiment apprécié les prises de vue et les lumiéres.

Selim a dit…

@pink_panther: ce que tu dis sur le profil de l'homme du tiers monde est vrai. J'ai voulu justement dresser le profil d'un homme parmi tant d'autres, pour témoigner de ces obstacles, de ces difficultés.
Et je te remercie de tes compliments sur mes photos!
A bientôt