08 mars 2013

ANC : déni de réalité et mauvaise foi



                                                    Audition d'Al Bawsala par la commission du RI

Les derniers chiffres révélés par Al Bawsala sur l’absentéisme élevé lors des votes à l’Assemblée Nationale Constituante (ANC) et sur le faible rendement des plénières nous ont valu des réactions d’une agressivité et d’une hostilité rares de la part de certains élus. Jusqu’hier en plénière et dans les couloirs de l’assemblée, des élus ont continué à nous interpeller, parfois avec énervement, pour remettre en question notre travail sans chercher à le comprendre. 

Alors que nos chiffres sont venus étayer des recommandations que nous avons formulé à la commission du Règlement  Intérieur lors de notre audition du 5 mars 2013 en vue de pallier à des dysfonctionnements qui expliquent, en partie, le retard pris par la Constituante dans ses travaux et l’image dégradée dont elle souffre auprès de l’opinion, certains élus n’ont rien trouvé de mieux comme réponse à nos propositions que de nous accuser « d’ingérence dans les affaires internes de la plus haute autorité en Tunisie », de « dépassement de nos prérogatives » et « d’atteinte à la légitimité des élus ». Rien que cela!

D’autres nous ont reproché notre « manque de précision » dans notre communication des chiffres, sans avoir pris la peine de lire le rapport d’audition que nous avons publié et où nous affirmons, noir sur blanc, que nous nous basons uniquement sur la présence des élus lors des votes en plénière pour déduire les taux de présence. Nous ne cessons depuis 3 jours d’apporter ces précisions, et d’expliquer notre méthodologie, auprès des élus, dans nos différentes communications et dans les médias. 

Il faut dire que ces derniers ne nous ont pas aidé, bien au contraire. Dans leur écrasante majorité, ils ont soit mal compris, soit déformé les chiffres que nous avons présenté, ou alors omis d’apporter les précisons nécessaires pour expliquer notre méthodologie de travail. Un exemple parmi tant d’autre, le fait de laisser croire que les taux de présence communiqués englobent toutes les activités des élus à l’assemblée (plénières, commissions, réunions, etc.), ce qui est faux. Comme à leur habitude, les médias ont voulu surfer sur un sujet « chaud et vendeur » auprès d’une opinion remontée depuis des mois contre l’ANC et dans un traitement de l’information plus sensationnaliste qu’objectif. 

Nous avons également eu droit à quelques démonstrations magistrales de mauvaise foi, à l’exemple de l’élu Mahmoud El May pour qui nos chiffres sont corrects concernant ses votes pour la loi de finances (où il est présent à 80%) mais faux en ce qui concerne ses votes pour l'ISIE (présence à 2%). Ou encore Samia Abou, toujours prompte à vanter « l’intelligence du peuple tunisien », mais qui considère dans ce cas précis que beaucoup de citoyens, qui peuvent se montrer « simples dans leur compréhension », pourraient mal interpréter nos chiffres… Faut-il alors qu’on cache nos statistiques, sur lesquels toute une équipe travaille depuis des mois, de peur qu’ils soient mal interprétés? Certainement pas. 

Plus affligeante encore est la réaction des différents partis politiques à nos chiffres et leur récupération de ces données pour singer le camp adverse, quand notre but était d’appeler à une prise de conscience des élus de tous bords de la nécessité de revoir leur mode de fonctionnement. 

Finalement, le plus important dans cette histoire est que nous avons accompli notre mission, celle d’alerter aussi bien les élus que les citoyens sur la gravité de ces dysfonctionnements, au moment juste où l’amendement du règlement intérieur est en cours de discussion à l’ANC. Et nous ne le répèterons jamais assez, demander des comptes à nos élus n’est pas un abus de pouvoir, mais bien un droit sacré dont nous comptons user. Que nos chiffres dérangent certains élus est une très bonne chose , car ça a le mérite de les sortir de leur déni de la réalité, celle de l’absence de sens de responsabilité chez beaucoup d’élus, et celle du mécontentement d’une large partie de l’opinion sur le faible rendement de l’ANC.