17 juin 2011

Ben Ali devant la justice : procès ou exutoire?

Le procès de Ben Ali démarre lundi prochain et j'ai du mal à m'en réjouir : le contexte politique et judiciaire dans lequel on prétend vouloir faire éclater la vérité sur 23 ans de dictature ne s'y prête absolument pas. 

Les conditions de succès d'un procès aussi important pour une majorité de tunisiens en soif de vérité et de justice sont loin d'être réunies. Nous avons à la fois une justice "juge et partie", et un gouvernement de transition qui fait tout pour étouffer la vérité.

Peut-on véritablement faire confiance à une justice corrompue et dépourvue de légitimité et de pouvoir? Une justice qui a longtemps executé les ordres de l'accusé, facilité son ermprise sur la société, et qui a autorisé l'emprisonnement et la torture de ses contradicteurs, est-elle aujourd'hui à même de rendre un jugement juste et objectif ? Ou n'est -elle pas simplement entrain d'obéir, comme à son habitude, aux ordres d'un exécutif qui cherche à cristaliser les rancoeurs et les colères pour mieux les évacuer?

Le gouvernement de transition a eu à maintes reprises l'opportunité de prouver sa bonne foi, et de recouvrir la confiance qui lui fait tant défaut. Mais il a à chaque fois fait le contraire. Le ministère de l'intérieur et ses "affiliés" jouissent toujours d'une certaine immunité. On continue d'étouffer les voix qui dénoncent et à dissimuler la vérité. Comment peut-on prétendre vouloir juger Ben Ali alors qu'on fait tout pour protéger son système sécuritraire, censeur et répressif?

Dans ce contexte d'absence de contre-pouvoir judicaire, mais aussi médiatique et politique, que peut-on espérer du jugement du dictateur et de ses proches, qui plus est en leur absence? Leur procès peut-il n'être que symbolique? Peut-on nous permettre de bacler cette étape primordiale à la réussite de la révolution? Ben Ali ne serait-il pas la meilleure "sorcière à chasser", pour maintenir en vie un pouvoir qui agonise?


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