03 avril 2012

Tunisie : la politique, une histoire de mots..


Comprendre les discours des dirigeants politiques et décoder leurs messages à travers la logorrhée qui nous est régulièrement servie dans la presse est un exercice difficile en ces temps de cacophonie médiatique.

Nous avons essayé par un moyen simple, et plutôt ludique, d’y voir un peu plus clair. L’exercice consiste à dessiner un nuage de mots-clés à partir des déclarations récentes tenues par des personnalités publiques afin de voir les termes et les thèmes qui ressortent le plus dans leurs discours respectifs :
 


Moncef Marzouki, Président de la République, dans deux entretiens récents accordés aux médias français : ici et ici  

Si le temps de l’exil semble lointain depuis qu’il multiplie les visites guidées pour ses invités au "Palais" de Carthage, le Président Marzouki ne rompt pas complètement avec le passé avec le mot "dictature" qui revient dans son discours. Marzouki semble vraiment insister sur le fait que "maintenant" , le "pays" est en "révolution" grâce au "peuple". "Justice" et "droits" sont aussi des éléments centraux d'un discours qui tourne autour de sa propre personne avec le « j’ai » répétitif. Mots les plus récurrents : « j'ai » et « pays ».



Hamadi Jebali, Chef du Gouvernement, dans
un entretien accordé à La Presse le 28 Avril 2012

Jebali, quant à lui, parle principalement de son « gouvernement ». Contrairement au « j’ai » de Marzouki, ce sont les « avons » et « sommes » qui sont le plus souvent employés par Jebali. Tout comme pour Marzouki, le « peuple » est omniprésent dans son discours. Le chef du gouvernement se montre ouvert à la « concertation » et se donne un cadre : la « loi » et la « morale ». Il insiste aussi beaucoup sur les notions de « compétences » et « d’expérience »… Mots les plus récurrents : « avons » et « gouvernement ».



Mostpha Ben Jaafar, Président de l’Assemblée Constituante, dans
un entretien publié dans La Presse du 30 mars 2012

Il semblerait que le Président de l’ANC « pense » beaucoup... « Évidemment », la « constitution » revient souvent dans son discours. Ben Jaafar se montre à la fois pressant avec les « faut », « absolument » « temps » ; et poli avec des « concensus », « mesure » et « manière ». Mots les plus récurrents : « pense » et « constitution »

 
Béji Caïd Essebssi, ancien premier ministre, dans un entretien publié dans la Presse le 27 janvier 2012 :

BCE évoque principalement ses réalisations : « gouvernement » et « constituante ». Il se positionne non seulement comme un observateur aguerri qui « estime » et « trouve », mais aussi comme dirigeant qui « dirige ». Tout comme Ben Jaafar, il évoque la « situation » du pays mais contrairement à ses prédécesseurs, on ne retrouve pas dans son discours la « Tunisie »… Mots les plus récurrents : « gouvernement » et « constituante »



Yaadh Ben Achour, dans
un entretien accordé à Amnesty International début mars 2012 :

C’est Yaadh Ben Achour qui évoque le plus la religion avec l'« islam » au centre de ses paroles. Il tient un discours universaliste avec des mots comme « démocratie », « droits », « homme », « liberté », « société ». « Esprit » et « révolution » sont des mots centraux dans un discours plutôt réaliste avec l’emploi de « misère », « violence » ou « contradictions ». Il évoque aussi le « XIXème siècle », probablement en référence à la tradition tunisienne. Mots les plus récurrents : « islam » et « révolution ». 


Post initialement publié dans le blog des Cahiers de la Liberté.


 

2 commentaires:

Squizocube a dit…

Du coup, que peut on extraire de ces données brutes ?
Que Marzouki n'a pas rompu avec la personnalisation du pouvoir ? que Jbeli cache son indécision derrière le nous ? ou que Ben Jaafar, ne sert à rien ?

Selim a dit…

@Squizocube : par exemple :)