"Lors d'une croisière en Censurie, la Tunisie mérite une escale : premier pays africain à avoir investi Internet, rutilante vitrine de l'informatisation des citoyens et des nouvelles technologies louée par Bill Gates (" Je suis époustouflé par la Tunisie "), cet Etat est à la pointe de la cybercensure. Dès 2000, dans une blogosphère encore déserte, il innovait en censurant sur son territoire le forum Takriz.org, ("ras-le-bol".org). La même année, son premier cyberdissident,Zouhair Yahyaoui, était arrêté dans un publitel (cybercafé) et condamné à dix-huit mois de prison pour avoir proposé un sondage sur son site, Tunezine : " La Tunisie est-elle un royaume, une république, un zoo, une prison ? "
Le mariage des technologies dernier cri de cybersurveillance et d'un Etat policier a engendré en dix ans une triste routine – cyberdissidents emprisonnés et blocage systématique des sites de la presse étrangère dès qu'un entrefilet déplaît. Lofti, un Tunisien qui vit en Europe, se souvient qu'il n'a jamais pu accéder au portail français Voila.fr lors d'un séjour au pays. Pourquoi ? A cause des dépêches AFP que le portail propose ? De photos trop sexy ? Les questions aussi sont mal vues. A noter : l'ATI, depuis ses débuts, est toujours dirigée par une femme. Khadija Ghariani, ingénieurSup Telecom Paris promo 1984, Feriel Béji, docteur en intelligence artificielle, et Lamia CheffaiSghaier, ingénieure en génie électrique, s'y sont succédé. En dissidence, on les surnomme les Ben Ali's Angels, une production locale sous-titrée : " A nous de vous faire détester Internet ! ". La Tunisie est aussi championne d'un certain cyberhumour."
Source: Article du Monde "Les censeurs du Net" par Claire Ulrich
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