Il est surprenant de voir à quelle vitesse la rumeur de rapt d'enfants en Tunisie s'est propagée, causant une remontée d'inquiétudes et d'angoisses impressionnante dans la population. Amis et famille ne parlent que de cette rumeur, qui s'est propagée en empruntant simultanémant deux vecteurs efficaces et à effet multiplicateur: Internet, via Facebook, et la vieille technique de "bouche à oreille". Cette histoire a pris des proportions et a causé assez d'affolement pour que certains journaux tunisiens démentent, témoignage de sociologue à l'appui.
L'absence de démenti officiel d'un côté, et le manque de crédibilité des journalistes de l'autre ne fait qu'augmenter les angoisses. Faute de pouvoir affirmer ou infirmer avec certitude ce genre de faits supposés, il est intéressant de se pencher un peu plus sur cette histoire récurrente de rapts d'enfants et de trafic d'organes par des réseaux organisés.
Contrairement à ce que l'on pourrait penser, ce récit ne date pas d'hier. On peut remonter au moins au 18ème siècle - à une époque où technologies d'information et techniques de transplantation d'organes n'existaient même pas-, pour trouver des récits similaires à ceux qui hantent les esprits des tunisiens aujourd'hui. Celà se passait en France:
En 1768, la foule envahit le collège car une rumeur était montée dans Lyon disant que les moines abritaient un prince manchot et enlevaient des enfants pour leur voler leur bras et le donner au prince. L’émeute fit 25 blessés puis on revint à la raison devant l’absence manifeste de prince.
Plus récemment, dans les années 90, des récits de rapts d'enfants et de trafic d'organes ont recommencé à circuler un peu partout dans le monde. Il s'agissait à chaque fois des mêmes faits, avec des variantes spécifiques à chaque pays, région ou culture : des touristes drogués pour subir un vol d'organe au Brézil, les enfants pauvres des bidonvilles kidnappés pour être dépouillés de leurs organes et pour allimenter le marché noir en Argentine, etc.
Même si ces rumeurs peuvent être inspirées de faits réels ou vraissemblables (car il existe vraiment des trafics d'organe d'enfants dans le monde), on ne pourrait nier le fait que beaucoup de ces récits relatés sont le plus souvent le fruit de l'immaginaire collectif. Ces rumeurs apparaissent et disparaissent subitement, sans que l'on puisse connaitre leur origine ou comprendre leurs causes. C'est un phénomène social. Ce qui est certain, c'est qu'il existe des circonstances favorables à la formation et à la diffusion de tels récits : une angoisse populaire latente; absence de sources d'information fiables et crédibles; la peur ou la méfiance de l'autre, de l'étranger, de l'inconnu, de la nouveauté, de la modernité; moments de conflits ou d'instabilité politique où la désinformation par la rumeur pourrait servir une cause, ou une idéologie.
4 commentaires:
Il parait que sous nos cieux chaque saison est propice à un genre de colportage. Ces jours ci les rapts d'enfants ont la cote, avant le 13 aout certains affirmerons que la bigamie sera instamment annoncée, à la fin de l'été c'est au tour de la rallonge de la séance unique qu'il sera sujet et ainsi de suite :)
@ Khanouff : Oui, on vit au rythme des rumeurs!
en fait médicalement parlant, ce n'est pas possible;
le don d'organe est certes de mise, un vol peut se produire, mais pas de cette maniére!
le rein humain par exemple ne peut pas rester en dehors du corps humain plus que 6 heures, et dire que le rein fait partie des organes les plus résistants!
donc le fait de stocker des organes dans un frigo tout bête n'est scientifiquement pas possible;
ceci aurait pu être plus réaliste s'il s'agissait de cornée!
mais bon;
en plus l'histoire du mec qui va au poste police pour dire: "écoutez, je suis un voleur!" est vraiment hilarante!
@ Pink: Merci de ton témoignage "médical":) Cela démontre encore plus que la rumeur est infondée..
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